Le sorbier et le cormier
(Rosacées comme le prunus, le prunier, l’amandier, le cerisier, le pommier (Malus) et l’amélanchier).
o Des oiseleurs (Sorbus aucuparia)
o Domestique ou cormier (Sorbus domestica)
Il existe 80 espèces de sorbiers.
Histoire, origines, croyances, toponymie et étymologie communes aux deux arbres :
« Sorbus » désigne en latin les cormiers (Sorbus domestica) et l’alisier torminal (Sorbus torminalis). Sorbus serait issu du celtique sormel : de sor signifiant rude et mel, pomme. Certaines sorbes (fruits des sorbiers) sont effectivement amères et astringentes. L’origine du mot sorbus, dérivé du latin sorbere (avaler, dévorer) est à écarter ; ce n’est pas, non plus, sorbere qui a donné le mot français sorbet mais le turc chorbet.
« Aucuparia » vient du latin auceps, aucupis, oiseleur.
« Domestica » vient du latin domesticus, domestique, cultivé par l’homme.
Sensé chasser les esprits maléfiques, le Sorbier des oiseleurs était régulièrement planté près des habitations. De même, moutons et agneaux passaient dans un arceau de Sorbier pour conjurer le mauvais sort et les préserver. Cette vertu du Sorbier des oiseleurs était également mise à profit, en Estonie et en Suède, où l’on frappait le jeune bétail d’un coup de bâton de cet arbre pour lui éviter maladies et accidents, mais aussi pour favoriser la fécondation. L’appellation de Sorbus aucuparia en norvégien (rogn), suédois (ronn)et en anglais (rowan) est à rapprocher de rune, tablettes de bois (Sorbus ?) sur lesquelles étaient gravés les secrets magiques.
Celtes et Germains vénéraient cet arbre sensé protéger l’homme contre les puissances divines maléfiques.
Cormier apparaît en 1130 (Roman d’Eneas) et dérive d’un mot gaulois curmi cité par Pline l’Ancien (23-79) comme le nom de la bière des Celtes insulaires (Irlande). Cuirm en irlandais signifie bière. Service tree en anglais, à rapprocher de cervoise. Les Anglais, privés de vignes, ont toujours été de fervents adeptes de la fabrication de vins de fruits. L’appellation du cormier (Sorbus domestica) par « service tree » est évidemment significative.
Une croyance populaire fait état qu’un fermier voulant baptiser un veau doit couper , avec une lame en cuivre, une branche de sorbier tôt le matin avant le lever du soleil. Muni de cette branche, il frappera le veau en l’appelant par son nom puis fixera celle-ci à la porte de l’étable entourée de rubans blancs et de coquilles d’œufs. Cette coutume remonterait aux Celtes.
Le sorbier des oiseleurs (Sorbus aucuparia)
Floraison :
– Mai à juin. Les fleurs blanches de 8 mm de diamètre, à 5 pétales, en grands corymbes de 15 cm de diamètre, à la fin du printemps.
– Mellifère.
Pollinisation entomophile, la dispersion des graines est faite par les animaux particulièrement par les oiseaux qui se régalent de la pulpe des fruits et contribuent à la dissémination des graines, non assimilées car résistantes aux sucs digestifs des oiseaux.
Fructification :
– Fruit : fausse drupe sphérique ou baie globuleuse de 8 mm de diamètre, orange-rouge (sorbe) ou jaune (variétés ornementales) formant souvent de lourds groupes. Les fruits rouges et amers de ce sorbier sont des friandises pour les oiseaux (les merles, les grives, …), malheureusement les tendeurs ou oiseleurs (chasseurs d’oiseaux utilisant de grands filets) appâtent leurs victimes (principalement des grives) avec ces fruits. Les fruits rubiconds de cet arbre sont aussi nommés cochènes.
Taille de 2 à 20 m à feuilles caduques. Les feuilles sont pennées jusqu’à 15 folioles à dents aigus parfois rouges à l’automne. On le trouve dans des terrains découverts tels que les terrains vagues, les landes, les bruyères, les montagnes entre 800 et 1500 m et les talus des terrils. Comme tous les sorbiers, il aime la lumière. En montagne, c’est le seul feuillu à côtoyer l’épicéa jusqu’aux limites de la végétation et on le trouve sous forme d’arbrisseaux à plusieurs troncs dans des endroits les plus inaccessibles, il est résistant au froid. On peut le planter comme arbre d’ornement. Son bon développement sera assuré sur des sols argileux et fortement calcaire.
Le tronc est court et fissuré horizontalement, la ramure de l’arbre est claire. Le rameau portant les bourgeons est brun violet et ceux-ci sont couverts de poils gris. Les feuilles à l’automne font apparaître des mosaïques de couleurs rouges, jaunes et brunes. Les feuilles sont parfois confondues avec celles du frêne ou du sureau. Celles du sorbier sont composées de folioles insérées face à face contrairement aux autres où elles sont décalées.
Multiplication :
– Rejet de souche, greffe et semis.
Utilisations :
Son bois est assez dur et dense.
Autres usages :
– Autrefois : pièces de machines, carrosserie, manches d’outils, et tonneaux. On l’a longtemps utilisé dans l’industrie du tissage pour fabriquer les navettes.
– Actuellement : tournerie, ébénisterie, des vis, des roues, des objets d’art
– Usages particuliers : ornementation (surtout en alignement), eau-de-vie (sorte de kirsch). Le sorbitol est très connu comme propergol de fusée en association avec le nitrate de potassium (salpêtre). Grâce à sa basse température de fusion, il se lie très bien avec le nitrate de potassium pour former du propergol solide.
– Les sorbes, riches en vitamine C, sont toxiques consommées crues, mais s’utilisent pour faire des confitures acides, des gelées (la pulpe sans la graine est cuite avec beaucoup de sucre, pouvant accompagner des plats de viande) et des compotes (qui soulage la gueule de bois). Après fermentation, on peut obtenir un vin ou une eau de vie (qui guérit des crampes et a des vertus sur les troubles gastriques et intestinaux), mais il faut retirer les graines qui contiennent de l’acide cyanhydrique. Les sorbes ajoutées au cidre de pomme ou de poire les conservaient plus longtemps.
Usages médicinaux :
La feuille est purgative, pectorale. Le fruit est diurétique et antiscorbutique.
Le sorbitol tient son nom du sorbier dont les baies contiennent beaucoup de sorbitol. Mais le fruit à plus haute teneur en sorbitol est en fait le pruneau. Le sorbitol ou glucitol est un édulcorant, au pouvoir sucrant deux fois plus faible que le saccharose mais moins bien assimilé. On le retrouve dans certains aliments diététiques. On l’utilise dans les médicaments, les cosmétiques faciaux comme excipient ou stabilisant et en tant qu’agent humidifiant et épaississant. On le retrouve souvent comme ingrédient dans la plupart des dentifrices et des gargarismes contre les maux de gorge. Son goût frais en bouche, conféré par sa qualité de polyol, justifie sa présence dans les solutions d’hygiène bucco-dentaires. C’est aussi un laxatif lorsqu’il est consommé à haute dose.
Le sorbier domestique ou cormier (Sorbus domestica)
Il ressemble au sorbier des oiseaux, les feuilles sont les mêmes mais avec des dents plus petites.
Floraison :
– Avril à juin. Les fleurs blanches de 1,5 cm de diamètre, à 5 pétales, en corymbes arrondis de 10 cm de diamètre, à la fin du printemps.
– Mellifère.
Pollinisation entomophile, la dispersion des graines est faite par les animaux.
Fructification :
– Fruit : la corme qui est une baie globuleuse ou piriforme, jaune-vert taché de rouge, de 3 cm de long. La variété pyrifera a des fruits rouge-vif ressemblant à des poires miniatures, la variété pomifera, elle, a des fruits verts ressemblant à de minuscules pommes. Les cormes sont comestibles, mais ont un goût désagréable (âcre), si elles sont récoltées avant les gelées ou pas assez mûres.
Taille de 5 à 20 m à feuilles caduques. Les feuilles sont pennées jusqu’à 21 folioles dentées rouges ou jaunes à l’automne. On le trouve sur les pentes de montagne et les forêts caducifoliées. Il est assez frileux et pousse dans le sud de l’Europe.
Multiplication :
– Rejet de souche, greffe.
Utilisations :
Son bois est le plus apprécié parmi les sorbiers. Il est très homogène, dense et dur, à grain très fin, se travaille bien, au beau poli, stable, et très résistant.
Autres usages :
– Autrefois : pièces de machines (dents d’engrenage, cames,…). Cet usage passé et la croissance très lente du Sorbus domestica explique sa rareté dans les campagnes.
– Actuellement : on l’utilise en gravure (car il permet une gravure très fine, voir aussi Buxus sempervirens), sculpture, tournerie, ébénisterie, crosses de fusils, lutherie, marqueterie, manches de couteaux, instruments de dessin et de mesure, outils de menuiserie et d’ébénisterie (rabots,…).
Usages particuliers :
C’est un excellent bois de feu, excellent charbon de bois.
Au XVIIIe siècle, on rajoutait des cormes séchées et réduites en poudre à la pâte du pain.
On en tirait aussi une boisson fermentée qui ressemblait au cidre : le cormé.
Au XVIe siècle, le médecin-chirurgien français Ambroise Paré (1509-1590) cite le cormé comme boisson ; c’est une sorte de cidre produit par fermentation des cormes écrasées dans l’eau. Dans l’ouest de la France, le cormé était considéré comme une boisson dangereuse altérant les facultés intellectuelles. En Touraine existe l’expression : abruti par la boisson de cormes.
La cervoise (cerevisia ou cervesia en latin), boisson fermentée à base de miel et de fruits (cormier, aubépine, cornouiller, …), pourrait avoir pour origine le gaulois curmi ou corma qui au Ve siècle désigne une boisson fermentée à base de cormes (fruit du cormier ou sorbus domestica).
Dans sa Flore populaire ou histoire naturelle des plantes dans leurs rapports avec la linguistique et le folklore (Paris, 1896-1914), Eugène Rolland signale que les cormes ou sorbes, tellement âpres avant blettissement, permettraient, à qui souhaitait changer de sexe, d’accéder à ce désir à une condition : il te faudrait d’abord manger sept sorbes sans faire la grimace.
Cette astringence fut également mise à profit selon le botaniste français Thore (1803) : « ab scortis … ad fraudandam virginalement ». Ce qui pourrait se traduire librement par : après des amours illicites, pour donner l’illusion de la virginité. Une décoction de sorbes utilisée au bon endroit resserrait l’organe fautif.
Usages médicinaux :
Le fruit est anti-nauséeux et anti-diarrhéique.
Le bourgeon, utilisé en gemmothérapie), est un régulateur de la circulation. L’usage des bourgeons conviendrait aux affections circulatoires du système veineux en tonifiant les parois des vaisseaux.
Dès l’Antiquité, les propriétés des sorbes ou cormes sont sollicitées ; notamment pour leur haute teneur en gomme (±1%), émolliente et anti-diarrhéique (voir également Sorbus torminalis, l’alisier torminal). Les tanins (± 2 %) donnent au fruit des propriétés astringentes et cicatrisantes. Environ 7 % d’acides (citrique, malique et tartrique) agissent comme agents osmotiques (régulation des transferts de substances et d’eau au travers des parois cellulaires). Des substances pectiques (± 2,5 %) sont antihémorragiques).
très bon site sur le cormier et les sorbiers en général.
Je possède aussi beaucoup, de renseignements sur cet arbre qu’est domestica. Nous en reproduisons par semis (difficilement) et avons recensé les arbres séculaires du nord Poitou. J’ai aussi beaucoup de photos.
Par contre, un manque…savez-vous que la variété pyriformis (et qui n’a pas les fruits rouges mais marron au contraire de pomifera) est une variété sélectionnée par l’homme pour réaliser les fameuses piquettes. Les pomifera sont plutôt les sauvages, enfin, chez nous en tous cas. Si vous voulez en savoir plus, n’hésitez pas à me contacter.